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Point of View est une organisation à but non lucratif basée à Mumbai qui apporte les perspectives des femmes dans le domaine public, social, culturel et communautaire par le biais des médias, de l’art et de la culture. Le travail se regroupe autour de cinq programmes, dont les thèmes novateurs sont les suivants : La lutte pour l’espace libre (pour que le concept de genre en général ait une place dans le domaine public), Repousser les limites (pour faire valoir les différentes réalités des femmes de l’industrie du sexe telles qu’elles-mêmes les voient), Parler en langues (pour mettre en valeur les questions relatives au genre, à la sexualité et aux droits, souvent marginalisées), Défendre nos corps (pour permettre aux femmes de s’exprimer et de prévenir la violence domestique), et Changer d’objectif (pour renforcer les capacités des femmes et leur permettre de s’exprimer sur les plateformes de médias). Avant de devenir membre formel du réseau, l’organisation était partenaire d’APC pour le projet Création de réseaux EROTICS en Inde, au Népal et au Sri Lanka. APCNouvelles a interrogé Bishakha Datta, co-fondatrice et directrice exécutive de Point of View pour mieux connaître leurs motivations et leurs attentes vis-à-vis de cette adhésion au réseau.

APCNouvelles : Vous participez aux projets d’APC depuis longtemps, mais pourquoi Point of View a-t-elle décidé de devenir membre d’APC ?

Bishakha Datta : Parce que nous sommes sur la même longueur d’ondes – ce sont les mêmes sujets qui nous intéressent. Très peu d’organisations travaillent comme APC sur trois types de droits à la fois – numériques, de genre et sexuels. Et peu s’intéressent vraiment aux trois. Or nous travaillons nous aussi justement sur cette triade de droits, alors on peut dire que c‘était la combinaison idéale pour une application parfaite !

APCNouvelles : Votre partenariat avec APC dans le réseau EROTICS existe depuis des années. Est-ce que c’est ce qui vous a encouragé à devenir membre ?

BD : Bien-sûr ! J’avais personnellement entendu parler d’APC avant même de travailler avec eux dans le réseau EROTICS, et ça avait éveillé ma curiosité. Ce n’est qu’après deux-trois ans de travail avec EROTICS-Inde qu‘à Point of View, nous avons tous réalisé la relation profonde et durable que nous avions établie avec APC. L‘étape suivante, devenir membre, s’avérait donc évidente. La question n‘était pas si nous allions devenir membre, mais plutôt, quand nous le ferions.

APCNouvelles : Selon vous, quelle est la plus grande qualité du réseau d’APC ?

BD : La diversité et la solidité de ses politiques. Quand j’ai vu la carte des membres d’APC, j’ai constaté que nous venions de toute l’hémisphère Sud. Nous travaillons sur le même type de questions à partir de points de vue ou de perspectives différentes, mais nous partageons tous une même compréhension politique. Pour nous, les choix technologiques ne sont pas neutres, mais basés sur les structures éco-politiques ; ils en découlent et y sont étroitement mêlés. Beaucoup de monde travaille aujourd’hui sur la question des technologies, mais sans toujours comprendre la question politique. Les membres d’APC si. Et puis, bien-sûr, il y a la formidable fête annuelle du réseau APC. J’y suis déjà allée à trois reprises et je compte bien continuer.

APCNouvelles : Qu’apportera Point of View au réseau? Autrement dit, comment définissez-vous la valeur ajoutée de PoV pour le réseau ?

BD : Nous fêtons cette année nos 20 ans – et nous travaillons sur le genre et la sexualité depuis nos tout débuts. Nous luttons depuis de nombreuses années pour la défense des droits des travailleuses sexuelles, et nous axons également aujourd’hui notre travail sur les femmes handicapées, inévitablement considérées à l’opposé des travailleuses sexuelles sur le spectre de la sexualité (non-sexuel —> trop sexuel). Notre travail auprès des femmes marginalisées leur apporte une très solide compréhension des droits sexuels et de genre. Il s’agit de femmes pour qui la stigmatisation, la discrimination et l’invisibilité sont presque aussi normaux que le fait de boire une tasse de thé. Et pour qui la stigmatisation, si elle provient aussi du genre, est également étroitement liée à la sexualité.

Nous apportons par ailleurs deux décennies de travail auprès de différents médias et formes artistiques, et concernant les technologies de l’information et des communications. Deux décennies de lutte sur des questions relatives à la voix, au silence, à la censure (notamment liée à la sexualité) et ce, pratiquement depuis nos origines… des questions qui se répètent aujourd’hui dans les espaces numériques.

APCNouvelles : Quelles répercussions pensez-vous que cette adhésion aura sur votre travail local en général, et plus particulièrement en ce qui concerne les droits sexuels, les handicaps, et la liberté d’expression ?

BD : Apprendre, collaborer, poser des défis et avoir des défis à relever, ouvrir nos yeux sur ce que nous n’avions jamais remarqué avant, changer notre vision des choses, voir selon un nouvel angle – c’est tout cet entremêlement de richesses que nous nous attendons à croiser sur notre chemin en devenant membre.

APCNouvelles : Avez-vous un message que vous aimeriez transmettre au réseau et à la communauté APC ?

BD : Je me suis toujours sentie inspirée par cette phrase de l’anthropologue Margaret Mead : « Ne doutez jamais qu’un petit groupe de gens réfléchis et engagés puisse changer le monde. C’est d’ailleurs toujours comme cela que ça s’est passé ». Alors conservez votre enthousiasme !

Photo de Pierre-Selim sous licence Creative Commons .